Parmi les jeux AAA de cette 7ème génération, rares sont ceux dont la cohérence arrive à la cheville de Dishonored. Si certains jeux aux aires condescendants ont une espèce d'immunité des critiques malgré leur banalité cachée derrière un enrobage attirant (salut Bioshock Infinite), les mettant à l'abris des quolibets journalisitiques malgré leurs piètres game-design et cohérence, d'autres comme Dishonored, plus humbles, parviennent à enterrer toute concurrence lorsqu'il s'agit de cette cohérence tant convoitée, ce paradigme ici infaillible mais trop souvent bancal dans le jeu vidéo.
Si je devais résumer Dishonored en quelques mots, ce serait cohérence, liberté et immersion. Auxquels je rajouterai amour et respect. Car ce jeu, et il suffit de quelques demi heures de jeux pour s'en rendre compte, a été fait avec grand amour de la part des grands développeurs d'Arkane Studios.
Une immersion de tout instant, avec des dialogues intéressants de la part des PNJ, qu'ils soient sollicités ou non. Car là où un Bioshock Infinite possède des PNJ comparables à des pantins ignorant le joueur, ceux de Dishonored discutent entre eux, ont leur vie, leur personnalité. Ce sont des hommes qui ont une vie à côté de leur sale boulot de rondes, pas des PNJ attendant que le joueur se pointe, sortant de nul part pour nous canarder en devinant d'où l'on arrive sans même nous avoir vu. Ils font leur boulot, prennent des pauses, se balancent des vannes, parlent de tout et de rien, parlent de choses utiles dans le gameplay, utilies à l'univers du jeu...Bref, on est dedans, on vit cet univers.
Plus impressionnant que cela, ils réagissent de façon systémique au monde et aux actions de l'univers. Mettez vous devant Sokolov, médecin et grand inventeur dans l'univers du jeu, en train de peindre un model afin qu'il vous somme de vous décaler. Si vous persistez, il arrêtera de peindre et partira en vous faisant une remarque. Mangez la pomme d'un PNJ afin qu'il s'exclame "eeeeeh, ma pomme! Vous vous croyez où?!" (véridique). Neutralisez un garde dans une pièce, et un autre garde pourra venir et se dire "devrait y avoir quelqu'un de garde, ici...". Désactivier un système de sécurité, et un garde attentif pourra demander à un autre, plus tard, "qui a désactivé le portail foudroyant des quais?", et l'autre de lui répondre "Si tu veux mon avis, tout le monde est en train de perdre la boule". On trouve aussi ça et là énormément de notes, de lettres, et autres écrits renseignant sur l'univers du jeu, ou implicitement sur le gameplay. Il y a même des lecteurs d'audiographe que l'on peut activer afin d'écouter les enregistrements de certains PNJ. Plus fort encore, en étant caché, on pourra assister en direct à l'enregistrement de l'audiographe par le PNJ, l'audiographe étant bien sûr disponible à la réécoute juste après. Toujours dans les détails, même les pièces de monnaie ne sont pas génériques, et on en trouvera de plusieurs sortes reconnaissables au premier coup d'oeil. Ce ne sont que des exemples, et le jeu regorgent de ce genre de détails renforçant l'imersion, la cohérence du tout. Tellement rare de nos jours. Tellement parfait que cela en devient d'autant plus impressionnant. Afin de vivre pleinement l'aventure, il est donc important d'écouter les discussion des gardes puisque parfois utiles aux possibilités de gameplay, et de lire un maximum de notes.
Toujours au niveau de l'immersion, le body awarness se veut conséquent et de qualité. De nombreuses subtilités d'animations sont présentes, comme la réception après un saut conséquent, les animations de kills, d'assinats aériens à la Assassin's Creed mais évidemment en vue subjective ici, les enchainements d'animation (kill/étouffement+port du corps sur l'épaule), glissade, nage et changement de direction, escalade...et des détails qui font toute la différence, comme le changement de position de la lame de Corvo suivant qu'il soit debout ou accroupi, ou encore le fait de pouvoir ranger ses armes avec style s'il vous plaît, en restant appuyé sur la touche action, ce qui a pout but de rétracter la lame de Corvo avec une certaine classe.
A tout cela s'ajoute un gameplay aux petits oignons. Clairement impressionnants, les choix donnés au joueur sont vertigineux. Là où beaucoup de jeux donnent des outils au joueur avant de le limiter quelques minutes plus tard (exemple : "je peux grimper sur un objet de taille X", mais le jeu n'autorisera le joueur à grimer que sur un certain nombre d'objets de taille X, ce qui n'est pas logique), Dishonored fait les choses en grand jusuqu'à surprendre le joueur. De nombreux outils nous sont donnés, et il n'apparitent qu'à nous, joueurs, d'être créatifs. En gros, si vous imaginez un truc avec les outils à votre disposition, alors vous pourrez le faire. Et c'est ça qui est fou avec ce jeu, c'est cette liberté, ce bac à sable d'une cohérence à toute épreuve. Le jeu changera du tout au tout, en fonction de vos actions, avec une présence plus ou moins importante de rats et de contaminés par la peste. Tuer tous les gardes du jeu ou pas un seul garde de tout le jeu, tuer toutes les cibles ou non, ou alors seulement certaines, auxquels cas des répercutions seront ressenties et entendues un peu partout par la suite, que ce soit par les PNJ in game ou l'histoire elle même, arrêter le temps, posséder un animal ou un humain, blinker à tout va, se prendre pour Faith dans MIrror's Edge...les possibilités sont toutes ouvertes, et le plaisir de jeu est là comme rarement.
En soutien de l'immersion générale, la direction artistique est absolument grandiose. Sans faille. Une merveille. Que ce soit les enormes buildings de Dunwall au travers desquels filtrent les rayons de soleil, les intérieurs chics, ou des souterrains humides, tout est fait avec grande justesse, procurant une certaine classe à l'univers du jeu. Le même soin est apporté aux personnages du jeu, avec des visages marqués et marquants, reconnaissables au premier coup d'oeil. Une réussite visuelle totale. C'est un jeu très, très beau, doté d'une âme visuelle certaine.
En parlant des personnages du jeu, notamment ceux que Corvo cotoie entre chaque mission au Hound Pits, sorte de microcosme aux aires de havre de paix, chacun a sa propre personnalité. Ils pourront nous parler en nous croisant, ou on pourra les solliciter de nous même afin qu'ils parlent. On en apprend plus sur leur vie, leur ressenti, au fur et à mesure des missions, et surtout en fonction de ce que l'on fait. Le summum des personnages étant pour moi Emily, fille de l'impératrice. Ses lignes de dialogues, son comportement et ses actions la rendent infiniment plus humaine qu'une Elizabeth d'un Bioshock Infinite, et je pèse mes mots. Tout simplement humaine. Et sutout merveilleusement bien doublée en français. Ne surtout pas hésiter à lui parler un maximum, il y a de quoi sourire.
Tout ce soin apporté au jeu, dans tous ses compartiments, impose le respect. Dishonored est fait par des passionnés pour des passionnés, un jeu d'une rare générosité, d'une rare liberté, aux actions libres et aux conséquences systémiques et cohérentes, à l'immersion totale et au gameplay aux petits oignons. Doté d'un cachet visuelle d'une classe certaine, et de personnages hauts en couleur, marquants, surtout une certaine Emily, infiniment plus humaine que la vantée Elizabeth de BIsohock Infinite, ce jeu est tout simplement, et sans aucun doute, l'un des meilleurs jeux de la 7ème génération de console. Je suis fier de l'avoir suivi depuis son annonce, et fier d'avoir soutenu un jeu de cette trempe, merci Arkane Studios. J'ai voté pour ce jeu, avec le nerf de la guerre.